Une ordonnance faible pour une loi dépassée
Lausanne, 1er juillet 2021. Pour mettre en œuvre le contre-projet à l’initiative pour des multinationales responsables, le Conseil fédéral a rédigé une ordonnance totalement insuffisante, qui exemptera la plupart des entreprises de leurs obligations de diligence. Au regard de la majorité populaire en faveur d'une plus grande responsabilité des entreprises, les œuvres d’entraide Pain pour le prochain et l’EPER exigent que le Conseil fédéral améliore l'ordonnance et qu’il ne vide pas de sa substance une loi qui est déjà dépassée.
Le 29 novembre 2020, l'initiative pour des multinationales responsables a été acceptée par 50,7% des citoyen-ne-s suisses. En raison de la non-majorité des cantons, le texte n’a cependant pas passé la rampe de la votation et c’est le contre-projet indirect qui entrera en vigueur le 1.1.2022. Pain pour le prochain et l’EPER ont critiqué dès le départ le contre-projet exempt de toute obligation réellement contraignante et en deçà des exigences internationales. Le reporting non financier n’est qu’une obligation de transparence et là où une obligation de diligence est introduite, c’est de manière aléatoire et sans mécanisme de contrôle, ni de sanction. Avec l'ordonnance mise en consultation, le Conseil fédéral édulcore encore le texte et restreint son champ d’application. Finalement, très peu de nouvelles entreprises seront couvertes par les obligations de diligence en matière de travail des enfants et de minerais de conflit.
Des incitations à fuir sa responsabilité
En matière de travail des enfants, les exemptions sont nombreuses. Les PME, par exemple, sont complètement exclues, même si elles sont actives dans un domaine à hauts risques. Les grandes entreprises dont les produits sont fabriqués dans un autre pays européen sont également exemptées. Cette disposition crée un vide juridique dans lequel de nombreuses firmes vont pouvoir s’engouffrer. Dans la production de chocolat, par exemple, une firme suisse qui fait fabriquer son chocolat en Belgique sera dispensée de devoir de diligence, même s’il est de notoriété publique que des enfants travaillent dans les plantations de son fournisseur de cacao.
Enfin, l’ordonnance prévoit qu’en l’absence de « soupçon fondé » en ce qui concerne le travail d’enfants en relation avec un produit ou un service, l’entreprise peut par une auto-évaluation décider de ne pas accomplir son devoir de diligence raisonnable. Là encore, l’ordonnance incite les firmes les moins responsables à l’inaction.
La Suisse en retard sur les évolutions internationales
Plus de renseignements:
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pain pour le prochain/EPER: Chantal Peyer, cheffe d’équipe entreprises et droits humains; peyer@bfa-ppp.ch,
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